La cuisine tient lieu de tout : carrelage froid, formica, aluminium des pieds de table, peinture verte, paillasse où les cuivres reposent propres ; l’automne entre avec l’humidité des manteaux. On parle des résultats, non pas pour comprendre, pour tenir l’aveu à distance ; il revient de la route — parkings, chambres impersonnelles, odeur d’essence — et la solitude des kilomètres a déjà serré la main avant qu’elle ne se referme. Non pas l’enfant qu’il ne comprend pas, plutôt celui qu’il comprend trop : même inflexion, même dérobade, et l’obligation tacite de réparer ce qui a manqué. Ce qui arrive n’arrive pas : le geste survient comme si de tout temps il avait été là, et l’on reste à la même place, tenu par le quadrillage des dalles et la ligne brillante des pieds d’aluminium ; on ne nomme pas, on respire court, on attend que la pièce relâche. La violence, la rage, l’amour — ensemble et pourtant séparés : on croit choisir, on reconduit ; non pas une première fois, la répétition comme loi domestique, saisonnière, exacte. La peinture verte garde la lumière basse ; les cuivres tiennent le silence ; le formica renvoie le visage sans centre. Alors l’automne se replie dans l’odeur du café tiède, la table refait son rectangle, et sur le carrelage la fraîcheur persiste — rien d’autre.