S’atteler à une tâche, à un travail, à un projet. Ce qui conduit à s’atteler. Qu’il reste quelque chose malgré tout. S’atteler à l’écriture d’un journal, d’un carnet, laisser une trace. Ce qui est paradoxal puisque tu ne te relis jamais.
Une trace pour qui alors ?
Une trace dans l’invisible. Une opération magique. Peut-être.
Et ensuite quand tu publies c’est que tu es déjà mort, que tout ça ne te concerne plus. Que tu n’es déjà plus celui qui écrit ces lignes.
Peut-être aussi.
Les hypothèses ne manquent pas.
— Tu es trop tourné vers toi, penses un peu à moi.
Exactement le genre de phrase que j’entends depuis toujours.
Cette culpabilité qu’on voudrait que tu éprouves et par laquelle tu parviens, enfin, à bien vouloir prendre conscience du monde. A daigner prendre conscience de l’autre comme monde
Le monde se résumant à moi que tu ne regardes pas n’a jamais été le monde,
Peut-être parce que l’on a commis cette erreur une fois et qu’on ne s’en est jamais totalement remis.
mais comment l’expliquer et pourquoi.
As-tu encore envie de dépenser une énergie quelconque à vouloir expliquer quoi que e soit ? Aucune envie justement.
Ça n’en vaut pas la peine. C’est idiot cette expression, mais c’est à peu près ça, une peine dépensée à vide, pour rien.
Fut un temps où tu ne ménageas pas ta peine. Puis ce fut ridicule de peiner ainsi à vide. Totalement ridicule.
Regarder froidement les faits.
Le fait de ne pas assumer pleinement une solitude. De faire chier le monde parce qu’on se sent seul abandonné. Le fait de se coller à l’autre comme si c’était une bouée, qu’on se sente naufragé.
C’est toujours la même histoire. Ne pas vouloir crever.
On ne peut pas en vouloir aux gens pour ça, c’est humain. Etre humain excuserait à peu près tout.
C’est toi qui es bizarre souviens t’en. Pour eux tu es une bizarrerie. Tu te fous de tout et de toi-même. Quelque chose ne tourne pas rond.
Être ou ne pas être du coté de la vie, de ce qu’ils appellent la vie.
— oui je veux pouvoir m’acheter du parfum, aller chez le coiffeur, partir en vacances, aller au restaurant …
Ça peut se comprendre.
L’écart peut se mesurer.
Tout laisser derrière soi encore une fois et partir. Ce refrain qui revient encore et encore. Tu ne sais que fuir m’a t’on dit avec chagrin.
Rejouer encore une fois sa vie aux dés. Quand je vois toutes les lâchetés dont on est capable pour maintenir un certain niveau de confort ou de paix tout simplement. Une obéissance insupportable - qu’on ne peut plus supporter du tout - intolérable- à un ordre des choses.
Peut-être que je serais d’accord pour qu’on m’enferme. Qu’on m’isole, qu’on me jette aux ordures comme une pomme pourrie pour ne pas contaminer toutes les autres pommes du panier.
Et tous ces imbéciles en transe avec leur confiance en soi jetteraient la clef de la cellule.
Aucune envie de vengeance cependant pour m’aider à tenir de longues années dans les souterrains d’un château.
Mais la nuit bien sur que je m’exercerais en douce à traverser les murs.
On ne peut faire autrement que de recréer sans cesse le monde. Même si on ne le veut pas, si on tente de s’y opposer, le refus créer encore quelque chose de proche de la même idée. Un gant retourné c’est toujours un gant.