Je ne prépare rien. J’aime improviser, j’aime cette sensation de me retrouver soudain suspendu au-dessus du vide, à marcher comme un funambule sur un fil. Si j’ai peur ? Oui, bien sûr, un peu tout de même, c’est-à-dire juste ce qu’il est nécessaire d’éprouver pour être poussé à effectuer le premier pas, et continuer ensuite à avancer.
Je me disais ça en rentrant de mon stage de peinture hier soir. Je me disais que ça avait fonctionné encore une fois, comme par miracle. J’avais encore osé me rendre là-bas les mains quasiment dans les poches. J’avais osé encore me dire : on verra bien.
Car quel enjeu au fond ? Que ça marche ? Que ça rate ? Que je gagne ou pas de l’argent ? Toutes ces questions que l’on se pose sans relâche à chaque pas que l’on effectue dans un sens ou dans un autre… À quoi bon ces questions ?
Si je suis ce que je dis, alors tout ira bien. Et si ça ne fonctionne pas, c’est que je dois continuer à polir mes phrases encore et encore. C’est que je suis encore trop éloigné de moi et du ciel. Donc une leçon nouvelle, des choses à apprendre… Il suffit de l’accepter, d’y prendre plaisir, de conserver l’enthousiasme comme une braise.
Le début de ce stage était assez classique. Quoique la présentation soit originale : trois vignettes en bas, un grand format au-dessus, le tout réalisé à l’encre de Chine avec juste un coin de tableau. Puis on enchaîne avec le fusain. Encore plus classique finalement, sauf qu’à un moment je propose de zoomer, d’agrandir le premier dessin. Mais peu s’égarent de la représentation d’un visage connu.
Et puis vient l’après-midi, la peinture.
Je fais coller des bouts de papier journal, puis on peint en les oubliant : un fond, puis le fameux visage.
Oh, les beaux visages bien peints, superbes…
Et maintenant, retirez donc les morceaux de papier que vous avez collés au tout début…
Horreur, stupéfaction, désolation : les visages sont presque entièrement détruits par les déchirures.
Reprenez le fusain, complétez la partie manquante… Rien de grave, allez, courage…