Suis-je de gauche, de droite, du centre ? Franchement, je n’en sais rien, et ça m’est égal. La politique m’effare, m’étourdit, avec ses marées d’opinions, ses jugements tranchés, ses décisions comme autant de claques jetées au visage. Pour moi, la politique, c’est surtout de la réclame : le même manège pour séduire les foules que pour leur vendre de la lessive. Et puis, il y a cette violence, une violence qui suinte la faiblesse. Trop de bruit, de fureur, comme pour compenser un vide. Je repense souvent à cette phrase : « Un homme, ça s’empêche. » Les politiciens, eux, ne s’empêchent rien. Ils s’imposent partout, exactement comme la réclame envahit nos maisons, nos vies, qu’on le veuille ou non. Alors, fermer les écoutilles, solution tentante mais trop facile. Non, mieux vaut rester face à tout cela sans s’emballer, stoïque, calme. C’est un exercice, une résistance tranquille. Après tout, tout jugement ressemble à un boomerang aborigène : il te revient dans la main avec un peu de chance, sinon dans le cul ou dans la poire. Vieillir a un avantage : on se laisse moins berner par ses propres enthousiasmes, ses espoirs, ses déceptions. Mais c’est aussi un inconvénient, cette lucidité. Dans les bouleversements actuels, le mécanisme reste le même : ce sont les plus fragiles, les plus insouciants, qui paieront le prix de cette obsession collective de survie et d’efficacité, de la perpétuation sans fin d’un système économique corrompu. Je repense à ma réflexion de la semaine dernière : ceux qui tirent le mieux leur épingle du jeu, ce sont les "beaufs", toujours. Obsédés par l’objectif, peu leur importent les moyens. Ce sont eux qui finissent milliardaires, hommes de pouvoir. Leur prétendue subtilité intellectuelle ? Un trompe-l’œil, un maquillage grossier. Ils sont nés pour écraser, pantins de leurs propres terreurs et la rhétorique est leur arme : interchangeable, contournable, une façade qui masque des intentions froides et des manœuvres sans état d’âme. Reste la littérature où se réfugier et peut-être tenter de résister. Parfois ça me semble tout aussi lâche que de se réfugier dans la peinture, la masturbation, la méditation, l’amour universel, les sucreries. Mais jamais vraiment été un foudre de guerre, vais pas commencer maintenant. En tous cas ce qui est évident c’est qu’on marche sur des oeufs à chaque minute de la journée. On ne sait plus rien du vrai, du faux, tout est si contradictoire. En même temps voir que tant de rationalité crée une si grande absurdité est amusant. Rire jaune. La tristesse l’emporte souvent ces derniers jours.