Je ne sais quelle obscure vanité me pousse à vouloir répéter encore que quelqu’un marche dans les bois, qu’il marche seul, sous le soleil, quelque chose au creux de sa main, serré entre les doigts. Les clefs d’une voiture, une gomme ou un caillou. Un petit caillou rond peut-être, ramassé en chemin, anodin dans la paume de la main. Un galet lisse, soyeux, comme s’il était important pour le monde, les lecteurs et les autres, l’univers tout entier, qu’il fût plutôt lisse que grenu, ou un peu rugueux au contact de la peau. Une sorte d’œuf de pierre, plat, roux et doux, poli depuis longtemps par les eaux d’un ruisseau et maintenant serré par la main d’un homme qui marche dans les bois. Dans une forêt décrite comme grise et verte, sous le soleil, écrite donc, subitement présente, apparue sans innocence. Sans fausse innocence. Sans innocence sincère non plus : Jacqueline me demande ce que j’ai fait aujourd’hui. Rien. Je n’ai rien écrit.

J’ai décidé d’arréter d’écrire, page 24, Pierre Patrolin