Plusieurs fois que je refais l’exercice, puis l’efface, et recommence, et patati et patata, ça devient réflexe. Que ce soit en peinture, à l’écrit, ce ne sera jamais assez bien, ou trop prétentieux, ou trop ceci et encore tellement cela. Ce sont des périodes de patinage pas vraiment artistique à traverser. M’en tire vis à vis de moi-même ainsi, Charlot de dos, marche en canard, un cercle l’avalant peu à peu sur l’écran. Mentir ainsi. Je me mens tu te mens il ou elle se ment… nous vous ils ; Tout le monde s’en tire comme ça. Ou pas. De cette exigence qui vient d’un sombre recoin de notre obscurité d’andouille. Mais l’insulter ne la diminue pas. Au contraire. Elle se braque.

Le projet Grimshaw est stoppé en plein vol. C’est difficile de mener de front plusieurs projets. Surement est-ce dû à une propension à la monomanie et , ou bien, en plus, ou à moins, très vite surbooké. Ou alors je deviens de plus en plus flemmard, ce qui n’est pas une éventualité à négliger, une propension très forte à la paresse, à l’oisiveté, m’accompagnant depuis toujours. La mère de tous les vices. Encore que je reprends mot pour mot ce que l’on m’a toujours dit. Je le reprends comme on parle d’argent content, quasi joyeusement, de peur que derrière cette facilité collective je découvre des abysses insondables d’inepties personnelles. Lorsque les écailles me tombent des yeux je rêve de poisson nageant entre deux eaux. Dernièrement j’ai découvert cette étrange possibilité d’allumer ou d’éteindre une ampoule à l’intérieur de mon crâne. Je vois toute l’horreur de l’hypocrisie de ce monde humain. Je suis dans le noir. J’appuie sur un interrupteur et voici : je me retrouve à Disneyland en train d’applaudir, d’hurler, de souffrir et de jouir dans le train fantôme. Ce qu’on appelle la vie. J’aurais pu le dire plus simplement en une phrase : ouvrir ou fermer les yeux. Sans sujet.

Je ne me bats pas pour ceci ou cela, on me l’a reproché, on me le reproche encore, je ne suis pas ce genre de battant. Je me sens dépourvu de cette naïveté là. Parfois je le regrette. Les écailles tombent au ralenti, elles peuvent mettre parfois des mois, des années, des décennies, toute une vie. En attendant qu’elles tombent totalement j’essaie de gagner ma vie, du temps, de voler quelque chose à l’inéluctable, en vain.

Depuis trois jours, je suis enfermé dans mon bureau à tenter de recréer un site d’artiste avec Indexhibit. Je n’ai pas choisi la facilité en restant sur Ubuntu, en ne maîtrisant rien des serveurs Lampp, et d’ailleurs des serveurs en général. Bien que la version 2 soit compatible avec PHP8.0.0 ( j’ai dû recompiler pour ça sans connaître les conséquences que ça pourrait engendrer au système dans son ensemble), fiasco et réussite se sont côtoyés puis fiasco a gagné. J’ai utilisé tout mon crédit journalier sur ChatGpt pour essayer de m’en dépatouiller, en vain. Puis je suis passé à la version de base qui m’a largement fait tourné en bourrique, alternant des solutions fumeuses avec des solutions débiles.

Donc il va falloir que je réinstalle un Windows avec un Wampserver, pour tester différentes versions de php et Mysql. C’est cela ou réinstaller Ubuntu sur la machine avec le risque de perdre notamment les fichiers de configuration de mon antique scanner que j’ai eu tant de mal à créer ;

Mais ces échecs finalement se superposent à tous les autres, fabriquant ainsi une sorte de double encore qui peu à peu sort de l’ombre. De là à songer que ma vraie nature est cette masse d’échecs, cette obsession de l’échec, une bête du Gévaudan inquiétante, terrifiante que je ne pourrai pas, cette fois, écrabouiller de toutes mes forces contre un mur enfantin. Il faut plutôt que j’aille chercher du petit bois, que je fabrique un feu, que je m’assoie à côté de la flamme, dans le disposition la plus aimable possible à voir surgir la bête et tenir en joue non celle-ci, mais toutes mes peurs.

Une phrase tourne dans ma tête. On ne doit pas présenter ses gouffres à autrui. Elle me met dans tous mes états cette phrase. Plus bas que terre surtout depuis que je l’ai entendue. Mais aussi, comme je suis paranoïaque, je me dis qu’elle fait partie d’une conspiration plus vaste, que c’est une sorte de poison, de manipulation, de complot… Comme si le seul recours qui m’était ainsi proposé était de sombrer dans cette folie furieuse que serait le silence total, absolu.

Pour aujourd’hui une photo ratée, complètement floue, une image qui illustre ce billet.