J’ai rêvé d’une éponge pleine de trous, et presque aussitôt, une certitude étrange m’a envahi : tous ces trous étaient parfaitement alignés. Et j’imagine, à mesure que l’éponge se dilate, elle dessine une courbe impeccable, comme si chaque trou connaissait sa place, fixée par une règle invisible. Cette distance constante entre eux, c’est ce qui permet à l’éponge de grandir sans jamais se perdre.
Est-ce que la vie ressemble à une éponge ou à une peau de chagrin ? Trouver la bonne distance avec les autres n’est pas une mince affaire. Trop proche, et on risque de se perdre soi-même ; trop loin, et c’est la solitude qui s’installe. Ma grand-mère estonienne parlait souvent du « juste milieu », et aujourd’hui, je pense comprendre ce qu’elle voulait dire. C’est un peu comme marcher sur un fil tendu entre deux tours : il faut un équilibre parfait pour ne pas chuter.
Pour jouer au savant je pourrais dire que je retrouve un écho à ce que les bouddhistes appellent « la voie du milieu » – cette idée de balance, de ne pencher ni trop d’un côté, ni trop de l’autre. Peut-être est-ce cette règle secrète, cette distance jamais modifiée entre les trous de l’éponge, qui nous aide à nous dilater, à grandir sans disparaître.
L’énergie noire pousse les galaxies à s’éloigner de façon croissante les unes des autres mais le rapport est conservé. Il faut un puissant télescope pour l’observer. Mais ma vie est tout à fait comme celle d’un univers, les choses s’éloignent, les souvenirs de ces choses également, tout comme la prise de conscience à étage de leur oubli ; mais le rapport, la relation de l’une à l’un de l’un aux autres , dans une partie secrète, mystérieuse de moi-même, restent inchangés. Est-ce que c’est ainsi que l’on maintient en soi le fantasme de l’infini comme celui de l’éternité ?
E. ne mange presque plus rien, elle oublie de plus en plus et jusqu’à ces chers souvenirs de Marengo. Avons feuilleté un album photo, elle reconnaissait à peine les visages, heureusement que les légendes permettaient de s’y retrouver. Et comme à chaque fois les fils de la télé sont débranchés. C’est à cause de la lumière rouge, elle ne peut supporter l’idée d’un appareil en veille.
Peut-être que ce journal ne devrait servir qu’à cela. Servirait-il à cela , il serait au moins utile. A se souvenir. Si je croyais au souvenir, il servirait à se souvenir. Téléchargé Je suis Providence de S.T. Joshi sur Anna’s archive que je peux désormais lire sur l’excellent Foliate découvert récemment sur les snaps de Ubuntu
Rappel de quelques commandes de base :
Installer un Snap : sudo snap install [nom_du_snap]
Lister les Snaps Installés : snap list
Mettre à Jour Tous les Snaps : sudo snap refresh
Supprimer un Snap : sudo snap remove [nom_du_snap]
Mais déjà beaucoup trop de matière. Voilà comment on invente un souvenir à venir. On ne se rappellera sans doute pas de cela dans moins d’un mois, mais de l’odeur de la pluie mélangée à celle que dégage parfois l’ancienne écurie, l’odeur des chevaux fantômes, tout comme parfois l’odeur du père quand je monte au grenier par l’échelle escamotable. Cette réflexion qui accompagne l’exercice, en profiter pleinement pendant qu’on peut encore le faire.
J’avais déjà repéré que ce dont on se souvient le moins c’est ce dont on pense au moment où l’on y pense qu’il soit indispensable de se souvenir. Sauf que ce qui nous apparaît indispensable est souvent une posture issue de l’air du temps, de la digestion, etc etc.
Intéressante réflexion sur l’idée qu’une phrase ne doit pas être émotionnelle, elle ne l’est pas, le paragraphe si. (G. Stein. how to write ) Et aussi l’emploi du terme bassin de vocabulaire. Ce qui me fait aussitôt associer petit et grand bassin à la piscine municipale de … ? La sensation désagréable de soupe tiède, ce contact de la plante pieds sur le carrelage, l’odeur de chlore, les peaux glissantes, semblable en cela à celles des anguilles, des poissons, poisseuses. Les mots qui nous échappent continuellement, les contenir un moment comme des carpes Koï. Les choses que l’on voudrait retenir, d’une seule journée, les mots et les choses, les trous filent à vive allure, mais toujours selon une constance mathématique.
Tenir un rythme quotidien. Le tenir pendant quelques jours, puis ne plus le tenir, sentir qu’il nous échappe. Ainsi par exemple avant hier et hier je n’ai scanné aucun négatif noir et blanc. Et, en y pensant ce pincement, comme d’être pris en faute de n’avoir pas respecté un engagement. Sauf que je ne me souviens pas d’avoir pris le moindre engagement. Et donc je peux m’y remettre dès maintenant, à cet instant même.
Encore des négatifs une bande prise depuis les hauteurs de Beaubourg, l’autre à Karachi. De quoi je me souviens à partir de ces images, de cette dernière notamment, d’une atmosphère, d’une luminosité particulière liée à la ville, les cris des oiseaux que nous entendions dès l’aube depuis la chambre, et très vite la chaleur. Mais, de cet instant particulier, cet instant où la photographie a été prise, pourquoi elle a été prise, rien du tout, c’est comme désirer viser à l’arc à côté dans l’espoir de toucher une cible en plein cœur.
Commencé à remplir les « exhibits » directement sur l’hébergement, création de galeries par année… aucun texte, que des images, une sorte d’accumulation progressive, une marée montante, un espoir de la voir se retirer par la suite, pour voir les coquillages luisants sur le sable. Sur ce site, pas de contact, pas de like, pas de commentaire. Juste des images de peinture, un chantier. J’ai été tenté d’ajouter une section photographies, mais ce sera sans doute plus pertinent sur l’autre site, celui où je ne vais plus depuis plusieurs semaines