Une nouvelle révélation de possibles. Proposition empruntée à Tous les mots sont adultes de F. quand il évoque ce que peuvent apporter les ateliers d’écriture en prison, notamment la réception des textes qui en résultent, à partir de ceux qui seront découverts. Et qui n’est pas en prison désormais. Si libre que nous nous imaginons être, le préjugé, le principe, la certitude, l’habitude ont également leurs verrous, leurs barreaux, leurs gardiens. C’est tout à fait de cette nouvelle révélation de possibles dont j’ai besoin chaque jour. Que cela provienne des autres ou de moi-même, quitte à l’inventer. Il faudra qu’à un moment je décrive ce mouvement étonnant qui se dessine à partir du refus de tout protocole, vers cette sorte de connaissance intime de tout protocole. Et à la fin ne plus être que protocolaire ; ce serait bien là l’ironie. Mais n’anticipons pas. La gène occasionnée par n’importe quel énoncé mathématique se confond souvent avec les énoncés de ces propositions d’écriture. Ma réaction à ceci est à peu près la même. Je n’en fais qu’à ma tête. Je ne cherche pas à comprendre car aussitôt une barrière se dresse, m’interdisant souvent de prendre avec c’est à dire cet ensemble, les autres et moi. C’est un reliquat de toute puissance enfantine certainement. Une sorte de refus instinctif que l’on pourrait vite confondre avec du mépris, si la véritable raison n’était en fait le manque de confiance en soi— en moi. Et donc de dire je ne comprends rien c’est certain, je ne pourrai jamais rien comprendre, mais rien de grave, j’y plonge tête en avant tout de même. Parce qu’au fond je sens bien que je ne suis pas moins humain que n’importe qui. Et aussi qu’avec l’habitude j’ai acquis un peu de détachement entre ce que je pense être, ce que les autres pensent que je suis, et ce que je suis en réalité. C’est à dire un lot, le même sac. Pas d’importance.
Lecture de blog, journal fantôme, sorte d’effet miroir, et en même temps cette réflexion qu’on écrit d’abord pour soi, suivie assez rapidement d’un doute . Puis d’un haussement d’épaule vis à vis de ce doute. Ce n’est pas encore temps, pour assurer la position.
Très difficile en ce moment de lire un livre en tournant les pages l’une après l’autre. Défaut d’attention, impression de déjà vu, boulimie ou fringale, c’est pas ça. C’est se défaire d’une manière de lire liée à l’idée du loisir, de l’évasion.
Lire vraiment, en réalité.
Lecture de Poe hier soir pour tenter de tromper l’insomnie. Mais effet inverse. L’excitation due à l’ironie relevée dans les descriptions d’intérieurs Appalachiens, dans ce petit livre—qui serait digne de figurer parmi ceux utilisés dans ces propositions d’écriture : philosophie de l’ameublement. A moins que ce ne soit grâce à mon assiduité d’y participer chaque semaine que désormais chaque livre soit une nouvelle révélation de possibles justement.
Remarque sur l’utilisation fréquente de ce « justement » Un peu trop fréquente pour être honnête. Sorte de mantra, utilisée à seule fin de tenter d’être juste, de m’en souvenir à défaut de l’être vraiment ? Ou bien simple ameublement, sorte de mobilier hérité dont on ne se souviendrait plus de l’origine. Ce qui me laisse songeur quant à ces mots utilisés à seule fin d’apporter un poids, peut-être une impression de poids seulement, ou de rythme, ou de véracité à la pensée de l’instant. Des mots qui viennent si naturellement sans y penser qu’on ne les louperait pas si on se relisait. Le bon gout de l’ameublement identique à celui d’utiliser les adverbes. Sauf que sur ce point je suis sans doute américain, j’ai le gout du jour, celui du petit bourgeois briguant ou fantasmant le bon gout d’une aristocratie qui n’existe probablement que dans mes rêves.
Désarçonné aussi en téléchargeant le logiciel Antidote pour mobile, essai gratuit pour un mois. Je n’ai pas trouvé la façon de l’utiliser pour corriger des textes. Puis je découvre qu’il faut utiliser une version web dont l’abonnement me semble hors budget pour l’instant. En étudiant les propriétés cependant je découvre une refonte de l’orthographe datant de 1990 qui autorise beaucoup de libertés avec les accents circonflexes et les accents graves. Dans les paramètres de l’application on peut même choisir le genre de graphie traditionnelle ou rectifiée. Très déconcertant. Aucune envie de me mettre à écrire de façon rectifiée. Ce qui me propulse tout à coup à nouveau dans les méandres d’une méditation sur la vieillesse, sur le fait d’être « has been ». Puis d’en rire, de refermer l’IPad et de me dire que j’ai stage toute la journée aujourd’hui. Et de chercher quelques protocoles pour le mener à bien. Voici toute l’ironie de celui qui fait de la prose ( ou du protocole en cours de peinture ) sans savoir qu’il en fait.