Ce texte parle d’un personnage nommé Elias Grimshaw qui réfléchit sur son identité et le choix d’un pseudonyme. Il explore la notion de se réinventer pour atteindre une sincérité et une justesse dans sa vie, loin des pensées négatives qu’il appelle « le dibbouk ». Elias se sent déconnecté de son identité réelle, la considérant comme une fiction. Il se moque de lui-même et de son nom de famille, exprimant une haine envers sa famille et un rejet de son passé.
Il évoque des images de loups, symbolisant peut-être son côté sauvage et une solitude ressentie après avoir quitté ou été chassé d’un groupe. Il regrette la perte de l’intimité et de la liberté qu’il associait autrefois à la nuit, contrastant avec la banalité du quotidien qui efface ses aspirations nocturnes. Enfin, il exprime une dualité entre son amour pour la nuit et sa haine pour le jour, révélant une lutte intérieure entre deux aspects de lui-même.
Les origines.
Elias Grimshaw est stoppé net. Peut-être que la seule chose intéressante dans cette histoire est l’invention du pseudonyme. Et aussi, par conséquent, le fait d’oser sortir d’une fiction de ma propre identité pour en reconstruire non pas une nouvelle, mais une autre qui aurait un ton plus juste, plus honnête. Une façon d’avoir une nouvelle chance. Mais mal entamée dès le départ, j’ai préféré en rester là. Cette nuit, j’ai certainement rêvé à cette histoire de justesse ou de justice, et probablement réglé des comptes. Avec qui, je l’ignore. Mais les premières idées qui surgissent au matin sont associées à une affaire de ton, de fréquence sans fausse note, je n’ose pas dire de sincérité absolue. Car aussitôt celle-ci risque d’être mise en charpie par les pensées soi-disant lucides qui ne cessent de me pourrir la vie. Il me vient à nouveau cette idée obsédante de réécrire toute ma vie depuis le départ avec cette fameuse tonalité juste et sans me laisser berner par ces pensées sombres que je nomme ici le dibbouk faute de mieux.
Mais cette affaire d’anonymat a commencé il y a déjà au moins deux ans désormais. La nécessité de trouver le ton juste l’accompagne. Le fait d’inventer un pseudonyme ne surgit pas d’emblée. J’ai commencé par m’en prendre à ma propre identité, celle que je présente d’ordinaire aux gens et qui n’est pas mieux, pas pire, pour moi qu’un personnage de fiction finalement. J’en suis horrifié, mais c’est ainsi. Il me semble que j’esquive depuis des années tout contact véritable avec les autres, que je ne leur présente qu’un double, un genre de bouffon. De ma propre identité, je me suis moqué, j’en ai fait de la charpie, comme de tout le reste. Ce nom de famille, comment s’en débarrasser au mieux sinon en en faisant une caricature. C’est toute ma haine, le rejet de cette famille que je constate à présent.
Quelqu’un ou quelque chose semble vouloir me posséder depuis les origines. Mais en fin de compte, rien qui ne m’appartienne vraiment. Il n’y a rien d’extérieur. Simplement des pans d’ombre inexplorés volontairement tant ils m’ont jadis déconcerté. Pourtant, il me semblait être déjà beaucoup aventuré dans la noirceur. Des images de loups m’accompagnent dans la nuit. Je ne sais pas si je suis l’un d’eux, en tous cas je n’ai pas peur, j’ai même de la peine car il me semble soudain évident avoir abandonné la meute, ou bien en avoir été chassé pour je ne sais quelle raison.
L’intimité de la nuit aussi m’aura abandonné depuis des années quand j’y songe, marcher ou courir dans la neige, les forêts, sentir l’oxygène envahir ma poitrine, mon sang, mes os. Nécessité de la faim si souvent confondue avec son homonymie la fin. Sentir au creux des reins le désir ardent. Quelque chose de l’ordre du loup plus que de l’homme, d’où cette impression d’être un genre de loup-garou. Mais c’est toujours fugitif. Le quotidien efface toutes ces images systématiquement avec le jour qui se lève. Longtemps j’aurais aussi entretenu une haine du jour, un amour profond envers la nuit. Car on n’a qu’un seul cœur.