texte original

Il y a une différence majeure entre croire que nous sommes à un certain niveau et y être véritablement. La peinture n’échappe pas à cette règle.

Pour comprendre ce qui ne fonctionne pas dans un niveau d’évolution ,il faut passer aux niveaux supérieurs sans quoi impossible d’avoir le recul nécessaire.

Puis à l’occasion d’un regard jeté sur le chemin parcouru, s’arrêter pour apprécier honnêtement mais aussi à l’appui des nouvelles connaissances que nous avons acquises, le fil imperceptible qui relie l’ensemble afin de suivre la trace, le fil conducteur.

Sans cela nous pataugeons et tournons en rond comme un hamster dans une cage.

Ces derniers jours, j’ai envie de ranger, de classer, de jeter, d’alléger. Faire le tri entre l’important, le nécessaire qui peut faire levier et l’inutile qui m’entrave, me scotche, me lie, m’ennuie.

Dans des cartons je retrouve une kyrielle de travaux de jeunesse et je les regarde d’un nouvel œil en tentant de lutter contre l’attendrissement de la nostalgie et la pulsion d’ouvrir un grand sac poubelle.

En retrouvant cette feuille de papier journal tâchée de couleur j’ai un doute avant de la froisser, la déchirer, l’évacuer. J e vais juste prendre le temps d’en reparler un peu, comme on parle à un ami sans fausse pudeur, sans artifice.

Voilà :

Je peignais dans des chambres de hasard, sans confort, et seule la flamme de mes désirs et de mes ambitions , autant dire la flamme des illusions, me réchauffait et me nourrissait tout en même temps. J’étais dans le niveau le plus bas de l’échelle dont je parle plus haut. Le niveau où l’on se préoccupe encore beaucoup trop de l’environnement, de ce qu’on va manger, du comment on va payer la chambre et acheter ses titres de transport.

Pour pallier les exigences requises par ce premier niveau, je travaillais comme archiviste dans une boite d’architecture. Un sous-sol poussiéreux où, s’entassaient tous les dossiers des projets réalisés ou pas, les études de plan, les calques de tout acabit, et les litiges réglés ou pas.

Je ne rechignais pas à la tâche, mais celle-ci était si facile, je disposais de longues périodes durant lesquelles je lisais tout ce que je pouvais trouver chez les bouquinistes, et à la bibliothèque de quartier. Je me souviens encore avoir lu « les vies » de Plutarque dans une vieille édition, mais comme ma spécialité est de digresser, je ne vais pas étaler ici la liste tout aussi hétéroclite que gargantuesque des nourritures livresques que je dévorais d’une façon que je considère aujourd’hui .. aussi désordonnée que désespérée.

Cependant voyez, je considérais que ma tache était facile, je m’étais installé dans une jolie routine qui me procurait de quoi assouvir ma soif d’apprendre, ma passion de la lecture.

Je ne gagnais pas grand chose évidemment et les fins de mois étaient toujours tendues à partir du 15. Ce n’est plus trop original de nos jours, c’est même devenu banal. En fait ce qui ne serait pas banal c’est qu’il en fusse autrement.

Pour lutter contre la routine et l’ennui j’avais élevé la rêverie à la hauteur d’un sacerdoce et il m’était assez facile de supporter cette existence en me projetant dans un avenir dans lequel,inéluctablement je serai peintre, écrivain, photographe, chanteur, érudit, philosophe, et bien sur « riche ».

La rêverie et l’espoir ne sont pas des phénomènes palpables. Ce ne sont que des rustines virtuelles que l’on tente de coller sur l’effroyable.

Sans organisation, sans plan d’action, sans accepter de se fixer des objectifs autres qu’hypothétiques, non seulement je n’étais pas libre mais en plus je faisais fausse route et j’allais me retrouver enchaîné plus encore par la suite.

Cette suite je ne vous la raconterai pas encore. Pas aujourd’hui, peut-être même jamais, ce n’est pas bien important. La seule chose qui me paraît importante ici c’est que pour voir il faut fermer les yeux. Revenir à la racine de soi et considérer le mental comme un périphérique.

Une souris, un clavier, un écran mais pas l’ordinateur.

Ce n’est pas le mental qui peut faire changer de niveau.

Changer c’est lâcher prise et ce terme est tellement galvaudé désormais, récupéré par des charlatans de tout acabit que je ne vais pas ajouter encore à la misère du monde.

Hier encore j’évoquais Ulysse attaché à son mat, dans « le chant des Sirènes »

J’adorais ce héros depuis l’enfance dans ce qu’il avait d’ingénieux et d’arrogant vis à vis des Dieux et des démons cependant qu’il n’est plus aujourd’hui qu’un homme comme tant d’hommes prisonnier d’une fausse idée de la liberté.

Alors finalement cette feuille de papier froissée et tachée de couleurs que personne n’a jamais vue, cachée au fond d’un carton, devrais je la jeter ou bien la garder ?

Texte revisité le 05/03/2024

La Quête de l’Authenticité dans la Création

La frontière entre se percevoir à un niveau de compétence et y être effectivement est souvent floue, et cela est particulièrement vrai dans le domaine de la peinture. Reconnaître cette distinction est crucial pour toute évolution personnelle ou artistique. Il est essentiel de transcender nos niveaux actuels pour obtenir la perspective nécessaire à une véritable compréhension de notre parcours. Sans cette élévation, nous nous retrouvons à errer sans but, semblables à un hamster dans sa roue, incapables de saisir le fil conducteur de notre évolution.

Le Tri Nécessaire : Entre l’Essentiel et l’Accessoire

Ces derniers temps, j’ai été pris d’une envie irrépressible de faire le tri dans ma vie : ranger, classer, jeter, et surtout alléger mon existence des superflus qui m’entravent. Ce processus de sélection, distinguant l’important de l’inutile, est devenu pour moi un levier essentiel de progression. En fouillant parmi mes souvenirs et travaux passés, je suis confronté à la dualité entre la nostalgie et la volonté de renouveau. Chaque objet, chaque œuvre retrouvée m’invite à un dialogue intérieur, où je pèse le poids du passé contre la lumière des connaissances acquises.

Une Flamme dans l’Adversité

Mon parcours a été marqué par des périodes de doute et de solitude, où seul le feu de mes ambitions semblait me réchauffer. Occupant des chambres éphémères, je luttai quotidiennement contre les préoccupations matérielles, tout en cherchant à nourrir ma passion pour l’art. Cet environnement précaire était le théâtre de mes premières expériences créatives, des moments où la nécessité de survie côtoyait étroitement l’impulsion créatrice.

De l’Archivage à la Quête de Savoir

Ma quête de savoir m’a mené à embrasser un travail d’archiviste dans une entreprise d’architecture, un emploi qui, malgré sa monotonie apparente, m’offrait d’immenses plages de liberté intellectuelle. Entre les piles de dossiers et les plans éparpillés, je trouvais refuge dans la lecture, dévorant avec une frénésie désordonnée tout ouvrage à ma portée. Cette période de ma vie était une lutte constante contre l’ennui, une quête insatiable de connaissance qui forgeait, jour après jour, la base de ma future identité créative.

Rêverie et Réalité

Je m’évadais dans des rêveries, m’imaginant successivement peintre, écrivain, photographe, voire philosophe. Ces fantasmes étaient des échappatoires face à une réalité souvent précaire, mais ils étaient dépourvus de plans d’action concrets. Ce n’est qu’en acceptant de fermer les yeux, de me détourner de ces illusions, que j’ai commencé à entrevoir la voie vers un changement véritable.

Vers une Libération Créative

Aujourd’hui, je me questionne encore sur le devenir de ces œuvres de jeunesse, symboles d’un passé révolu mais témoins de ma quête incessante d’authenticité. Dois-je les conserver comme reliques de mon évolution, ou les laisser partir pour mieux me libérer ? Cette interrogation symbolise le dilemme permanent entre attachement au passé et désir de renouveau, un équilibre fragile que tout créateur doit apprendre à naviguer.