Dans les couloirs encore ça me remonte : « qu’est-ce qu’on va devenir ? » Cette perpétuelle inquiétude qui expulse tout — présent, passé — cet élan pour s’extraire des tranchées du présent. Pas de petit coup de gnole, non. Juste un « qu’est-ce qu’on va devenir ? » et ça repart, comme en 14. On ne peut pas savoir. Et c’est bien fait. On ne peut pas savoir qu’à force de cavaler au feu des lendemains qui chantent ou pas, on abrutit l’avenir, on l’étouffe dans l’œuf, bien proprement. « Qu’est-ce qu’on va devenir ? » C’est un peu « qu’est-ce qu’on a été ? » C’est déserter.


Dans les couloirs encore ça me remonte, cette petite phrase qui creuse : « qu’est-ce qu’on va devenir ? » Cette perpétuelle inquiétude qui expulse tout du présent comme du passé, cet élan désespéré pour s’extraire des tranchées du présent, sauter par-dessus aujourd’hui pour atterrir dans un demain forcément meilleur. Pas de petit coup de gnole pour faire glisser, non. Juste un « qu’est-ce qu’on va devenir ? » machinal, et ça repart, l’engrenage, comme en 14, comme toujours. On ne peut pas savoir ce qui nous attend. Et c’est bien fait pour nos gueules. On ne peut pas savoir qu’à force de cavaler au feu des lendemains qui chantent ou qui gueulent, on abrutit l’avenir, on l’étouffe dans l’œuf, bien proprement, à coups de projections anxieuses. « Qu’est-ce qu’on va devenir ? » Au fond, c’est un peu « qu’est-ce qu’on a été ? » retourné. C’est déserter le moment présent. C’est la grande fuite en avant perpétuelle.


Dans les couloirs : « qu’est-ce qu’on va devenir ? » Cette inquiétude qui expulse tout. Cet élan pour fuir les tranchées du présent. Pas de gnole. Juste la phrase. Et ça repart. Comme en 14. On ne peut pas savoir. C’est bien fait. À force de cavaler vers les lendemains, on abrutit l’avenir. On l’étouffe. Proprement. « Qu’est-ce qu’on va devenir ? » = « Qu’est-ce qu’on a été ? » = Déserter.