Rien ne va vraiment ce qui fait que tout va. Il y a des accablements aussi fertiles que le sentiment déprimant d’arrachement que proposent les départs .Et je peux me retourner alors même que les vociférations continuent derrière moi, mais elles deviendront peu à peu un bruit de fond, celui du vent, de l’océan, guère plus. Et c’est après leur avoir tourné le dos que l’on saisira l’irréalité que nous prenions l’instant auparavant pour du réel. Toutes les chamailleries sont recouvertes ainsi que les meubles d’une maison par des voiles, c’est de l’indicible, de l’inexplicable . Ce qu’il reste : un vide, une désolation à priori qui remplit tout l’espace, et par quoi on comprend que la nature toute entière de l’espace, réel ou imaginaire est vide

Est-ce effrayant, pas vraiment. Ainsi tous nos actes, toutes nos paroles, nos écrits comme nos pensées, nos rêves, semblent issus de ce vide et y retournent. Nous sommes, là bouche bée, encore dans l’interrogation d’avoir vu passer autant d’explications futiles que vaines, des explications qui paraissent puérilement s’efforcer de ne jamais dire l’inexplicable.

Je remonte le cours des ateliers d’écriture du Tierslivre, 2018, 2019… Ces ateliers notamment sur la nouvelle datant de 2019 en parallèle de ceux de ce mois de mars-avril 2024. Peut-être qu’en réalisant de concert les deux séries de façon simultanée, je m’approcherai un peu plus de ce mystère que représente encore dans mon imagination le fait d’écrire une nouvelle. Ici,il faudrait justement parler de l’imagination, et surtout de tout ce qu’elle oppose d’emblée à l’acte d’écrire un récit court. C’est à dire une difficulté presque insoluble à première vue. Si on ne fonce pas directement tête baissée comme je le fais d’ordinaire.

J’ai remonté ma table dans le bureau, mais pas encore l’ordinateur. Pour le moment j’écris dans une remise attenante à l’atelier. La connexion internet est faible, j’ai bricolé un système de connexion Ethernet avec deux adaptateurs branchés à des prises électriques. J’ai aussi bidouillé un vieil ordinateur pour installer Ubuntu en me disant que ce système d’exploitation me conviendra tout à fait pour ce que j’ai à faire ici, c’est à dire écrire, seulement écrire.

La chatte vient s’allonger derrière l’écran et dort paisiblement. Je n’ai plus de textes d’avance, le temps passe à une vitesse stupéfiante. Hier encore je me disais rassuré d’avoir comme un avare ou un riche, un joli matelas de textes planifiés pour la semaine à venir. Mais la semaine est venue plus vite que prévu. Il ne me reste que les bribes de textes concernant ces ateliers d’écriture que j’écris ici directement dans l’éditeur WordPress .

La notion de journal devient parfois floue. Le but d’écrire un journal surtout, et surtout d’y déposer de si longs textes. Je crois que c’est pour contrebalancer quelque chose, un travail véritable dans lequel j’ai encore beaucoup de peine à m’engager comme il le faudrait. Comme il le faudrait. J’ai hésité avec comme je le voudrais. Mais je ne veux rien, rien du tout. Je me contente d’obéir à cette injonction inexplicable. Je me contente de suivre le mouvement après avoir tellement décortiqué les tenants et aboutissants de cet élan, au risque qu’il m’abandonne soudain, que je ne sois plus qu’une sorte de fantôme.