Toujours. Jamais. Parfois. Non, hier. Hier, j’ai passé un bon moment, enfin beaucoup de temps, à explorer l’architecture de SPIP. Dit comme ça, on dirait que c’est une ville, une antique cité slovène ou bosniaque — il n’en est rien. SPIP est un CMS (Content Management System en anglais ou SGC, Système de Gestion de Contenu en français). À ne pas confondre avec le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation, qui s’orthographie pareillement (SPIP).

Tout ça pour quoi ? Je ne le sais plus. Perdu le fil.

Donc, quel atout tout de même que cette intelligence artificielle ! En lui présentant mes codes, elle sait les corriger, les réécrire, souvent plus élégamment que je ne saurais le faire. De plus, avec la version 3.5 de ChatGPT, la conversation peut s’étendre beaucoup plus qu’avec la version 4 (limitée à 40 questions environ toutes les trois heures).

Reçu deux commentaires pour mon dernier texte publié sur la plateforme des ateliers. Et cette fois-là, j’ai pris la peine de répondre, mais par retour de mail, pas sur la plateforme. Toujours dans le doute, mais poli. Découverte de Henri Calet. Lu quelques pages. La Belle Lurette. Le ton est bien, comme j’apprécie. Ça change de mes derniers textes, bien alambiqués.

Sinon, quelque chose de terrifiant continue de planer, faisant trembler la réalité. Comme si un manque de pixels par-ci par-là laissait apparaître un autre monde, d’une noirceur effroyable. Hier, en versant la petite monnaie dans ma main, la boulangère avait les yeux vides. Et puis quelqu’un avait planté des pensées dans un parterre bordant le parking de la place centrale ; en m’approchant pour les regarder de plus près, j’ai eu l’impression qu’il s’agissait de tout petits visages d’enfants mort-nés. Et à noter aussi l’absence d’oiseaux, d’insectes. C’est pourquoi j’ai décidé de prendre clique et claque — d’emmener l’aîné des deux petits-enfants au buffet à volonté chinois de Chasse. Il faut avaler quand on est à ce point angoissé. Après avoir ingurgité une incroyable quantité de nourriture, tout à fait calmés, nous sommes repartis. M. a vomi discrètement dans la haie de troènes devant le restaurant. Cela m’a un peu gêné ; c’est dans ces moments-là qu’on réalise qu’on vieillit.

Ensuite, quelques emplettes au Lidl qui se trouve juste en face, pas besoin de bouger la Dacia. Pour aller plus vite, j’y vais seul. M. ne peut plus se traîner. J’ai acheté du café, un morceau de filet mignon en prévision des nems à faire demain. La bouffe prend une place considérable quand les petits-enfants sont là. Rentré à la maison, je me suis tout de suite attaqué à la farce. Ensuite, je me suis occupé de SPIP. En pénétrant dans ce temple de la consommation pour pauvres, j’ai repensé bien sûr à Annie Ernaux. À la façon de mêler récit de fiction ou d’autofiction avec des éléments très concrets décrivant une réalité politique, économique, sociétale. Ce qui me fait penser aussi que dans ce restaurant chinois, buffet à volonté, un local immense, l’essentiel de la clientèle était constituée de seniors, peut-être de retraités. Des groupes entiers avaient réservé leur table. Très peu de jeunes. Très peu de cadres en costume, surtout des ouvriers. L’ensemble baignait dans des tons gris, sans beaucoup de couleurs.

Dans le Lidl que je ne connais pas, c’est la première fois que j’y entre, j’essaie de surveiller mes pensées, mes émotions, mon envie d’acheter. Par réflexe, je n’ai pas pris de chariot, pas de panier à roulettes non plus, juste un cabas en plastique prévu pour l’occasion. On commence par le rayon des primeurs, des légumes, station prolongée devant l’étalage des carottes. Ce sont les prix que je regarde en premier, puis l’origine, et enfin la gueule des carottes. Je n’en prendrai pas. Au rayon des salades, juste une boîte de carottes râpées, pas besoin de plus. Je vois que je résiste assez bien à l’envie d’aller flâner dans les rayons où les gadgets sont étalés, une des particularités de la chaîne de magasins. La plupart de mes outils ont été achetés ainsi, certains jours de flânerie : scie sabre, machine électrique à aiguiser les couteaux, pistolet à colle, tournevis électrique, compresseur, pompe à huile. J’esquive, non sans fierté, la force d’attraction des deux ou trois rayons pour me diriger vers le café ; pas beaucoup de choix, pour une fois ce sera du Carte Noire. Puis vite j’arrive aux caisses, j’attends peu, c’est un soulagement. La fille derrière le plexiglas mettait les bouchées doubles, deux sorties pour les marchandises scannées, elle pouvait traiter deux clients en même temps pour ainsi dire. Par contre, il faut attendre que le premier ait payé pour payer soi-même. Et non, je ne veux pas le ticket de caisse. Sur la route du retour, vers Revantin Vaugris, aperçu dans un champ deux énormes oiseaux de proie sur une souche. Sans doute des buses, ce serait étonnant de voir des vautours ici.

Vu aussi que Google a encore sorti sa bistouquette, Gemini 1.5, 1 million de tokens — la course à l’échalote continue. Qui va gagner ? Celui qui a le plus de pognon, peut-être, ou celui qui a le plus de nerf. Si c’est vrai, car pour le moment beaucoup de blablabla de pub, les autres seront dans les choux pour un bon moment. ChatGPT 3.5 sera le Lidl de l’intelligence artificielle ou son buffet à volonté chinois.