— Tu as hésité longtemps avant de venir ?
— Oui.
— Pourquoi ?
— La peur, sans doute. Celle de ne pas savoir quoi dire.
— Tu sais pourtant que je n’attends rien de toi.
(Un silence. Les yeux cherchent un point dans le vide. Un souffle s’échappe.)
— C’est ça, justement. C’est ce qui me fait peur.
— Que je n’attende rien ?
— Oui. Comme si, sans cette attente, je ne savais plus quoi faire.
— Tu ne veux pas te tromper ?
— Non. Je veux être sûr.
(Un léger sourire. Presque imperceptible. Les mots se cherchent.)
— Être sûr de quoi ?
— De ne pas décevoir.
— Tu penses encore qu’on te demande quelque chose ?
(Il baisse les yeux. Sa main tremble légèrement. Une tension se devine dans le silence.)
— Je crois que je me le demande à moi-même.
— D’être à la hauteur ?
— Oui. D’être... juste.
— Tu t’épuises à chercher cette justesse. Tu le sais, n’est-ce pas ?
— Oui. Mais je ne sais pas faire autrement.
(Le silence retombe. Une feuille craque sous le pied. Un oiseau passe dans le ciel. L’air est lourd mais calme.)
— Et si tu acceptais de ne pas l’être ?
— Juste ?
— Oui. Si tu acceptais d’être simplement là. Sans lutter.
— Tu penses que c’est possible ?
— Je pense que ça commence par accepter ce qui est. Sans le juger.
(Il lève les yeux. Son visage est fatigué mais quelque chose en lui se relâche.)
— Accepter de n’être que ça ?
— Oui. C’est suffisant.
— Suffisant ?
— Pour aujourd’hui, oui.
(Un souffle apaisé. Les ombres s’allongent. Un rayon de soleil effleure les visages.)
