CHANT À SIRIUS
Quelles nuits te retardent, ô Sirius ! Ta lumière est une lance, et tu les transperces comme le guerrier qui frappe son ennemi jusqu’au centre même de sa vie. Tes rayons s’étendent au-delà des gouffres ; ils ouvrent un pont au-dessus, qui durera jusqu’à ce que les maillons de l’univers soient défaits, se séparent, et que tous les gouffres ne fassent plus qu’un, sans soleils pour les diviser. Que tu es fort dans ta place ! Tu marches ton orbite, et l’obscurité tremble sous toi comme une route battue par une armée. Tu es un dieu, dans ton temple évidé de lumière au cœur de la nuit infinie, dont le sol est le vide d’en bas ; tes mondes y sont prêtres et ministres. Tu laboures l’espace, tel un paysan, et tu l’ensemences de semences étrangères. Elles portent des fruits étrangers — et ceux-ci sont ton témoignage, comme les moissons des champs sont le témoignage du paysan.