Parfois on agit, on s’agite, on pense savoir.
Mais ce qu’on cherche n’est pas ce qui nous travaille.
C’est ce qu’on appelle le besoin ignoré — moteur caché, tension muette.
Le personnage croit vouloir A, mais c’est B (ou rien, ou autre chose) qui creuse en lui.
Ces cinq microfictions habitent cet écart.
1. Le tiroir
Il cherchait un papier — le bon, celui avec la signature.
Mais il s’est arrêté sur une photo, vieille, mal rangée.
Il l’a remise en place, lentement.
Le papier, lui, est resté introuvable.
2. Le café
Il l’invita pour “parler”.
C’est ce qu’il disait. Un café, une conversation.
Mais il parla de tout sauf de ça.
Et quand elle partit, il sut que c’était trop tard.
Il n’était pas venu pour parler. Il était venu pour rester.
3. Le bruit du frigo
Il a cru que c’était ce bourdonnement qui l’empêchait de dormir.
Il a déplacé le meuble, vérifié les branchements.
Mais quand le frigo s’est tu, il n’a pas trouvé le sommeil.
Le bruit venait d’ailleurs.
4. La pile
Elle a remplacé les piles de la télécommande.
Ce genre de gestes simples qu’on accomplit pour ne pas penser.
Mais quand l’image est revenue, elle s’est sentie un peu plus seule.
Ce n’était pas l’écran qui lui manquait.
5. Le carnet retrouvé
Il l’a rouvert par hasard, au milieu.
Des pages d’idées, de projets inachevés.
Il s’est mis à recopier les phrases, sans les corriger.
Il croyait vouloir reprendre l’écriture.
Mais il voulait simplement se relire.
Texte issu d’un travail sur le “besoin ignoré”, troisième variation sur le désir narratif,
dans la continuité de John Truby et sous l’influence discrète de François Bon et son double silencieux, Malt Olbren.
Ce que les personnages ne disent pas ici, c’est précisément ce qu’ils cherchent.