En revenant de Saint-Donat avalé un bol de soupe puis étalé de tout mon long vers vingt heure. Réveillé à minuit, bu un café, ce qu’il ne faudrait jamais faire, mais —bien que je le sache—, le plaisir infantile d’explorer encore la limite, d’enfreindre la règle, l’envie indécente de profiter du calme de la maison, de ma solitude, jouir de cette solitude à cet instant furent prioritaires. Et d’un égoïsme assumé. Rien ne me convient mieux que de m’asseoir devant mon clavier et d’écrire ce qui me passe par la tête. C’est là que je trouve, dans l’agitation primordiale, le véritable repos, et mes vrais amis qui tour à tour semble passer pour me visiter. En ce moment, Aragon que j’ai cité déjà hier, mais également Novarina, Bataille, Perec, Burrough, Cummings, Michaux, Beckett, Ponge, Prigent, désolé de ne pas vous citer tous mes bon amis.. Je me rends compte en plein milieu de phrase de l’absurdité vaine de cette énumération.
Ecrit bizarre qui jaillit soudain après ce semblant de réflexion :

C’était de ce temps où parcourant lentement la ville abjecte, où accablé par la hideur du monde je tentais encore d’avancer péniblement par les rues souillées d’ordures et d’inconnus
Chaque pas s’arrachait de haute lutte au sol collant, je traînais comme un boeuf son socle de charrue, mes semelles sur l’asphalte maculé de flaques graisseuses et de détritus. Hahanant intérieurment, pestant.
Les visages flottent ici comme des masques vides, des ombres sans regards, et leurs rires, quand ils éclatent, leurs paroles insensées , résonnent contre les façades, tournoient et frappent sans prévenir à la manière interlope d’où surgissent les gifles aussi humiliantes qu’absurdes
Me revoici donc écrasé par cette hideur, Bouchon aux couleurs ternies, cette fatigue, ce poids sans nom.
Et pourtant, quelque chose me pousse encore malgré tout vers l’avant, un reste d’instinct peut-être une simple habitude la fameuse du marche ou crève, d’un pas après l’autre. cette chose qui ne cesse de prononcer le terrible "Avancer, toujours avancer."
Et c’est alors, dans cet enfer d’immondices et de visages fuyants, qu’un éclat inattendu vint fissurer ce mur d’abjection : une lumière d’or, filtrant à travers un rideau déchiré, une feuille tourbillonnant et toute son infinie petitesse, dans un souffle de vent, sans oublier l’aperçu rapide et lent au relenti de ce chat roux, endormi sur un tas de journaux, indifférent au chaos. Ce n’était rien. Et pourtant, c’était tout. La ville tomba son masque, dans un éclat tellement fugace que j’eus peine à le considérer pour vrai, elle ébaucha un sourire de première communiante."

Ce n’est pas fini. SI ? Pas encore, pas maintenant. Quelque chose me le dit encore : patiente . Il faut vivre. tout vient de là et y revient.

La réponse viendra comme la question est arrivée : La réponse vient comme elle vient, de l’existence elle-même. A portée de main du manchot.

être boue être lumière être nuit être jour être pluie être sécheresse être seul être innombrable être cri cri cri être silence être vent être vide être étendu et plat être resserré et pointu être point de départ être point final être big et bang être proche et loin être immobilité et mouvement être noyau être néant être étincelle et explosion être naissance être mort être vie et mort être amour être absence être un pied dans l’orgueil l’autre dans la merde être cave un jour grenier une nuit être ailé et aussi lourd qu’un jour à devoir gagner son pain être unique être multiple être secoué de sanglots sanglots sanglots de rire et de chagrin être vainqueur par accident perdant par habitude être gueux et roi être au parfum du monde et à sa puanteur être une montée être une chute être une fracture être une ligne droite être froissé comme une lettre jamais lue être repassé pour des noces oubliées être soleil être pluie être gouffre être pic être tout être rien être tout et rien être l’aube et le crépuscule être un cercle une spirale être nulle part être partout osciller osciller osciller entre génie et idiotie

A la fin c’est encore trop long, il faut que j’en garde encore un peu pour demain. Que me retienne.