Le ciel est blanc — un blanc de craie, comme il vient sur les buttes, à la fin des vacances.
Les charmes et les frênes ne bougent pas. Je marchais entre eux pour me perdre.
L’herbe des prés de fauche est sèche, jaunie là où j’ai posé le pied.
Une vache charolaise mâche. Le bruit monotone accompagne mes errances.
Le chemin creux monte, vide. Il tourne au niveau d’une borne moussue — je ne sais plus vers où.
La maison en grès de mes grands-parents — les volets clos en plein jour. Une tuile plate a glissé.
Le toit a des laves fissurées. Je les comptais, des après-midi entiers.
Le temps ne passe pas. Seul un nat coule quelque part, invisible, comme le temps lui-même.
Je reste debout près d’une haie plessée. Mes mains touchent les prunelles dures, amères.
Je pense à des choses que j’ai oubliées. Peut-être les ai-je seulement rêvées.
Le silence n’est pas un silence. C’est l’absence de voix qui m’appellent.
L’ennui n’est pas un sentiment. C’est un état.
Comme être une borne, un tesson de grès, un piquet de frêne.
Quelque part, un fil électrique pend entre deux poteaux. Il bouge à peine.
Je pourrais rester là longtemps. Personne ne viendrait.
Et c’était cela, l’enfance : se perdre pour exister un peu.