Lecture de quelques pages de La Leçon de musique de Quignard. Cela me ramène instantanément à cette agacement : entendre des voix de femmes trop aiguës, instables, comme un étalage d’impudeur non assumée. Et même assumée, je ne saurais plus y faire face comme autrefois. C’est l’exaspération d’un pétard qui ne détonne pas, une longue tension pour les nerfs.
Descendre dans la bassesse — est-ce seulement celle d’une voix ? — pour préserver, protéger. Un regret, presque palpable, comme dans la chanson de Gainsbourg : "Je suis au regret."
La répétition. Quignard parle du plaisir répété, ce qui finit par user. Lire Quignard, c’est osciller entre une corde imaginaire pour se pendre, voir le monde en pénis ou vagins, ou plonger en apnée dans une poésie amniotique.
Il parle de la voix perdue, celle qu’on ne retrouve qu’à travers la musique, en instrumentiste ou en compositeur. Les mues inachevées d’une vie. Cela me remue au plus profond.
Ni envie de coït ni de l’extase des grenouilles, tout cela m’ennuie. Vieillesse véritable ?
L’image de la cabane en bois de mûrier devenue instrument de musique reste belle. Mais toujours, cette idée d’une aristocratie littéraire me hante.
Visualiser une séance Zoom sur un manuscrit, la discussion tourne autour du positionnement, exactement comme lors des échanges sur la peinture. Tout cela, pour plaire à un lecteur, un éditeur, ou un galeriste, leur mâcher le travail.
Étrange d’entendre FB parler de positionnement : une entreprise projette une image pour ses clients, et si elle ne correspond pas à leurs attentes, l’échec est assuré. Positionnement, toujours. Peindre ou écrire sans se préoccuper d’un destinataire précis. Est-ce alors vraiment de l’art ou juste un acte personnel ?
À la fin, fuir le positionnement, se plonger dans La Langue géniale de Marcolongo, revenir à la clarté du grec. Woolf disait que c’est au grec qu’on retourne quand l’imprécision de notre époque nous lasse. Le grec voyait le monde libre du temps, alors que nous en sommes prisonniers.
« Le temps présent et le temps passé... » Les mots de T. S. Eliot résonnent comme des échos dans un couloir jamais emprunté.
Les jours passent, fondent comme du beurre au soleil, et les nuits restent blanches. Ce matin, au forum des associations, avec deux toiles sous le bras pour prouver que je suis peintre, parce que les mots ne suffisent plus.
Illustration Acrylique sur papier "viande" format raisin.