ça commence comme ça en cherchant comment écrire en inclusif ça commence par iels et là je ne sais pas ce qui se passe mais ça sort d’un seul coup
on le garde on le garde pas la belle affaire on s’en fout
Iels écrivent, toustes. Celleux se congratulent, s’applaudissent, se lappent, se bijent, se clap clap clap, avec des “oh !”, des “ah !”, des “comme j’aime” et des “encore… j’en peux plus… continue.”
Et bon… ça rappelait quelque chose — mais quoi ? Si ça m’revient… la cour de récré, jadis, il y a longtemps, des lustres, belle lurette.
Les billes, les calots, les bonbecs.
Les escaliers, les jupes, les socquettes. les couetttes.
Les dents qu’on montre quand on sourit — incroyable, comme ça sourit, avec des dents en avant, des dents pointues. vampires, hémoglobine, les dents de l’amer à flots.
Des dents à déchirer la viande. À ronger l’os. À mordre tout c’qui bouge.
Des dents de cour de récré, pas pour sourire, mais pour survivre.
Des rictus de gosse carnivore. Des crocs sous les bonbecs. Et personne qui voyait rien.
Les aime pas. Les déteste. Les vomis. Les piétine.
Ces pourris, en rang par deux. Donnez-vous donc la main. Avancez.
Vers le perron, vers la classe, vers le stade, vers la piscine, vers la cantine, vers l’entreprise, vers la guerre, vers le cimetière, vers l’oubli.
Donnez-vous la main, bon dieu. Serrez-la fort. Qu’on n’en perde pas un seul.
Tout compte, tout comptera, c’est le contrat.
chez les verrats, les porcs, les truies, d’Ivry à Porentruy.
TVA et recettes fiscales obligent mon petit, cires bien tes pompes, montre papatte blanche, remonte ta braguette, peigne-toi bordel, peigne-toi.
et cours, cours, servir le petit café bien chaud à monsieur le directeur, madame la secrétaire de direction, monsieur le curé, monsieur le maire, monsieur l’abbé.
et surtout, surtout, surtout —
ne dis pas bonjour à cette pouffiasse de madame la pute, madame la gourde, madame l’agent, madame l’institutrice, madame la bibliothécaire, madame l’agent, madame qui joue à la dame, madame bouffe la reine, échec et mat.
La colère a du bon a dit machin, c’est bien vrai ça, opine machine, oui pine la pine la donc. Encore une petite pinacollada je vous prie. Et l’autre bouche en cul de poule qui dit oui oui oui encore s’il vous plaît.
iels écrivent se gargarisent s’enchantent tous ça pour se dire quoi ?
mais rien, rien, rien, et encore rien — sauf qu’ils ne sont pas seuls. les conconnes.
ce n’est pas politiquement correct me dit la charcutière en me montrant la tranche avec la tranche de son couteau plus fine. et j’ajoute que le politiquement incorrect est le politiquement correct de demain, avec trois saucisses de Strasbourg si c’était un effet de vot’ bonté.
ce que je veux dire c’est qu’à force de chauffer de chauffer de chauffer l’eau bout et que quand ça bout il faut y aller il faut mettre les pâtes les mains dans le camboui.
alors bon je les regarde je les lis très attentivement entre les lignes et qu’est-ce que je trouve ?
encore plus de vide donc ils mettent du vide en paravent du vide c’est ça la mode.
vous savez, non pas de croissant aujourd’hui je n’ai plus la queue d’un désolé. excusez je vous en prie à genoux pardonnez-moi d’être à sec si sec
C’est vert, vous pouvez y aller. si vous avez la ferraille le menue monnaie c’est mieux on m’a cloqué cette machine c’est le progrès disent-ils mais c’est pire donnez-moi l’apoint je vous prie s’il vous plait pitié ça m’évite d’ouvrir le tiroir caisse.
et pourquoi tu dis bonjour et pourquoi tu ajoutes toujours
bonjour bonne journée
tu te le demandes ce matin.
pour une fois tu dis je veux une baguette pas trop cuite tu paies et tu te tires.
ni bonjour ni merde ni veux-tu baiser mon cul.
ET VOUS FAITES QUOI DANS LA VIE ? -- j’me d’mande.
et puis qu’est-ce que ça peut bien vous faire à la fin ? c’est pas comme si ça vous intéressait vraiment.
mais mais mais —
si tu veux pas entendre ce genre de réponse ne pose pas de question à la con.
Translated in the spirit of Allen Ginsberg and Kathy Acker : part beat monologue, part punk incantation.
It starts like this— trying to write inclusive, it starts with "iels," and then I don’t know what happens, but it comes out in one rush, all at once.
Do we keep it ? Do we trash it ? Big deal. We don’t care.
They write, all of them. Themz. They clap each other’s backs, tongue each other’s cheeks, bite love into the neck, clap clap clap, with “oh !” with “ah !” with “I love this !” with “don’t stop—I can’t—keep going—yes—go.”
And then— it reminded me of something— but what ? If it comes back— the schoolyard, a long time ago, ages, forever and ever ago.
Marbles. Slings. Candies.
Stairs, skirts, socks, ponytails.
Teeth we show when we smile— unbelievable, how we smiled, with teeth out front, pointed teeth. Vampires. Hemoglobin. The bitter bite of saltwater, flowing.
Teeth to tear meat. To gnaw bone. To bite anything that moves.
Schoolyard teeth, not for smiling, for surviving.
Snarling kid grins. Fangs behind the sweet. And no one ever saw a thing.
I don’t love them. I hate them. I puke them up. I trample them.
Those bastards, in rows of two. Hold hands now. Move forward.
To the front steps, to the classroom, to the field, to the pool, to the cafeteria, to the office, to the war, to the graveyard, to forgetfulness.
Hold hands, goddammit. Grip tight. Don’t lose a single one.
Everything counts. Everything will count. That’s the deal.
With the swine, the hogs, the sows, from Ivry to Porentruy.
VAT and fiscal blessings, my dear. Shine your shoes, show your clean paws, zip your fly, comb your fucking hair, comb it.
And run, run, serve the steaming hot coffee to Mr. Director, Ms. Executive Assistant, Father Priest, Mr. Mayor, Monsieur l’Abbé.
And above all, above all, above all—
don’t say hello to that bitch Madame Slut, Madame Fool, Madame Officer, Madame Teacher, Madame Librarian, Madame again, Madame playing the lady, Madame gobbles the queen— checkmate.
Anger’s good, said so-and-so. Damn right, nodded what’s-her-face. Yeah, fuck yeah, one more piña colada, please. And that other one, fish-lipped, whispers “yes, yes, yes, please, more.”
They write, they gurgle it up, they delight themselves— all to say what ?
Nothing, nothing, nothing, and more nothing.
Except they’re not alone. The dumbcunts.
“This ain’t politically correct,” says the butcher woman, showing me the cut, a sliver thinner than truth. And I say, politically incorrect is tomorrow’s righteous cause, with three Strasbourg sausages if you’d be so kind.
What I mean is— heat it, heat it, heat it— till it boils. When it boils, drop the pasta, get your hands greasy.
So I read them. I read between the lines. And what do I find ?
More void. So they pack their voids in front of the void. That’s fashion.
“No croissants today.” “I’m out, sorry.” “Green light, go ahead.” “Got coins ? Better. Saves me the register.”
And why do you say hello ? Why always add, hello, have a nice day ?
You ask yourself that today.
Just this once, you say, I want a baguette, not too crusty. You pay. You leave.
No hello. No fuck you. No want to lick my ass ?
WHAT DO YOU DO FOR A LIVING ?—I wonder.
And then— what the hell does it matter to you ? It’s not like you care.
But, but, but—
If you don’t want to hear that kind of answer, don’t ask dumb fucking questions.
Illustration Georges Grosz " Piliers de la société" 1926/Illustration : George Grosz, Pillars of Society, 1926.