On écrit. On ne pense pas à l’organisation. On ne veut pas y penser. Pas tout de suite. Ce sera pour plus tard. Peut-être. Écrire, c’est autre chose. Rien à voir avec organiser, structurer, ranger. D’ailleurs, ça rapporte rarement. L’idée ne vient même pas.
Et pourtant, il faut bien. Relire, au moins. Se demander ce qu’on voulait dire. Se demander pourquoi on le répète autant, surtout la nuit, surtout le matin. Il arrive alors qu’on ouvre un logiciel, WordPress par exemple. Qu’on observe les autres, qu’on note leurs catégories, qu’on en crée une. Puis une autre. Puis cent-trente-neuf. On s’arrête juste à temps.
Trop. Il faut réduire. Aller à l’essentiel. Quatre catégories, pas plus :
— Propos sur l’art
— Propos sur l’écriture
— Propos sur la fiction
— Carnets et réflexions
Voilà. Quatre cases, c’est raisonnable. Suffisant. De toute façon, on pourra toujours en changer. Pour ne pas trop casser l’existant, on y va doucement, en local d’abord. Prudence.
On s’amuse avec du Python, des scripts, des bibliothèques obscures aux noms sérieux : BeautifulSoup, Pandas, NLTK. On bricole des index, des listes, des exports en Markdown pour Obsidian. Tout cela paraît efficace. Reste à voir si ça sert vraiment.
Mais le froid s’infiltre. Il ne fait pas si froid, pourtant, mais le froid s’infiltre quand même. L’écriture recule, la lecture prend le relais. Un livre, Les Grandes blondes, traînait quelque part. On l’a feuilleté, puis on s’y est laissé prendre. On s’amuse même à copier le style d’Echenoz. Mauvaise idée. Chacun son style. Et puis, des fantômes, on en a déjà assez.
J’exagère sans doute en mettant cette image ici, mais l’organisation m’évoque toujours la même chose. Un meurtre prémédité. Une volonté de contrôle un peu maladive.
J’ai lu quelque part que le management des grandes entreprises américaines, et donc, par effet de contagion, les nôtres, avait largement puisé dans une certaine science infâme pour asseoir son autorité. Une méthode de soumission bien rodée.
Moi-même, j’ai assisté à des formations en la matière. On m’a reproché d’être trop empathique, donc trop faible, donc inapte à mener qui que ce soit. Ce qui, en soi, ne m’a pas dérangé. Il y a des résistances qui ne disent pas leur nom, des forces qui se nichent là où on ne les attend pas.
Après tout, c’est idiot d’en vouloir autant à l’organisation. Elle ne date pas d’hier et survivra à toutes les infamies. Les bibliothèques et les tables des matières sont là pour le prouver. Mais parfois, les éclats de glace qu’on reçoit dans l’œil mettent un temps fou à fondre.