Pas possible d’écrire durant ces trois derniers jours. D’une part parce que j’étais en déplacement, d’autre part même lorsque j’obtiens, en jouant des coudes, un peu de solitude, la teneur de la proposition d’écriture, qui s’appuie sur Enfance de Nathalie Sarraute, me paralyse. Je ne cherche pas à brusquer les choses. Patienter plutôt. Tenter de remonter à l’origine du malaise. Le silence. Nous sommes beaucoup moins volubiles que les années précédentes. Comme une lassitude. Nous sommes capables désormais de partager un repas à quatre sans pratiquement dire un mot. Ce qui m’effrayait beaucoup les années précédentes, ce silence, ne me fait plus rien. Je crois même être parmi les premiers à me jeter dedans. S’il fallait conserver en mémoire deux spectacles de ces trois jours passés en Avignon, je placerais Pour un oui pour un non en tête de liste, puis Enfance de Nathalie Sarraute. Pour le reste, plutôt que d’en dire du mal, je préfère me taire. Nous sommes rentrés hier dans l’après-midi. Il fait frais. Ciel couvert. C’est pareil ce matin. Allongé dans le lit, j’ai même eu froid au petit matin. Des sensations d’automne ont pénétré dans la chambre. Des sensations d’automne associées à l’enfance, sur lesquelles on serait bien en peine de poser des mots. Le seul, surnageant à peu près net quand tous les autres se réfugient à présent dans le flou : inéluctable. Enfin, après avoir tourné toute cette masse confuse, j’ai rallumé l’ordinateur. Je me suis assis et j’ai pu écrire ma proposition 08. C’est venu d’une façon tellement bizarre que j’ai bien le sentiment que ce soit juste. En tout cas pour moi.