L’infini et le temps.

Pour ses 7 ans Alcofribas reçut une montre bracelet. C’était une Kelton, les aiguilles se détachaient élégamment sur fond blanc. Durant une journée entière il observa les petits sauts qu’effectuait la trotteuse. Au bout de quelques heures il parvint à déchiffrer les chiffres romains, et à la fin il savait lire l’heure. La grand-mère qui avait eu l’idée de ce cadeau, en parla durant une semaine. Les grands-parents d’Alcofribas vivaient encore à Paris. Ils louaient la moitié d’un septième étage dans une petite rue calme du 15ème arrondissement. Le balcon avait été aménagé pour empêcher tout drame. Un rideau de canisses tranquillisait tout le monde. Alcofribas avait détecté un défaut dans la cuirasse, quelques lattes brisées. Par cette meurtrière il considérait la rue, notamment le magasin du marchand de couleurs. Ce devait être le troisième jour des vacances. Alcofribas poussa la porte du magasin et se trouva nez à nez avec une petite fille. Ce qui l’arrêta fut une fossette. Puis il resta là : la petite fille avait un regard qu’il ne pouvait quitter. De toutes les premières fois déjà vues, il établissait une liste. Une seule restait à la hauteur : la frondaison du vieux cerisier. Depuis lors, il n’avait plus de cesse de guetter par la fente dans les canisses l’entrée du magasin. Parfois il tentait de s’en distraire en regardant la trotteuse de la Kelton.