réecriture

Chaque semaine j’avale quatre cents bornes. La Twingo vibre, pluie sur les vitres, ventilo qui souffle par zéro degré. Je pousse un livre audio pour couvrir le moteur. Des voix qui parlent d’écriture.

Je n’attends rien. Juste tenir éveillé. Les histoires entrent, se mêlent à mes pensées, se dissipent.

Autrefois j’avais mes carnets Clairefontaine, verts à reliure noire. Pas un autre. Le mauvais carnet me donnait l’impression d’écrire de la merde. Les bons, je les sentais dans ma poche comme une arme. J’y notais tout, je noircissais des pages entières. Naïveté, orgueil, prétention.

J’ai tout brûlé pour une femme. Les cendres m’ont collé longtemps aux doigts. Ce n’était pas de l’amour. Ce n’était pas de la littérature non plus.

Depuis j’empile des textes ici. Comme deux boxeurs qui s’épuisent sans vainqueur. Mille morceaux, jamais recousus. Paresse ou refus d’en finir.

Ces derniers jours l’obsession lâche un peu. Je vois la coquille que je traîne. Lourde, inutile. Peut-être temps de l’abandonner.

La route continue. La Twingo cabossée file dans la nuit. Les idées passent, volatiles. Une lumière d’autoroute, une buée sur le pare-brise. Il suffit de noter, ou de laisser filer.